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« UN TOASTEUR À GRAINS POUR MIEUX VALORISER NOS PROTÉAGINEUX »

Sébastien Schwab estime que le toastage des graines de protéagineux relève le niveau de production de 2 à 3 l par jour et par vache.© D.L.

En Vendée, le Gaec Ursule utilise un toasteur pour traiter par la chaleur les graines de féverole, lupin ou pois afin d'améliorer leur valeur alimentaire.

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LA RECHERCHE DE L'AUTONOMIE ALIMENTAIRE a toujours été l'un des principaux objectifs de notre exploitation, souligne Sébastien Schwab, l'un des quatre associés du Gaec Ursule de Chantonnay (Vendée). C'est pourquoi nous produisons et autoconsommons de la féverole, du lupin et du pois. Mais ces graines distribuées crues aux vaches n'expriment pas tout leur potentiel alimentaire. » Pendant plusieurs années, les membres du Gaec ont cherché des solutions pour optimiser la valorisation de ces protéagineux. Avec le Grapéa (Groupe de recherche pour une agriculture paysanne économe et autonome), ils se sont intéressés, fin 2014, à la technique du toastage qui consiste à chauffer les graines pendant environ une minute trente. Cette méthode, parfois utilisée chez des industriels de l'alimentation animale, est peu courante en France, mais déjà très développée en Allemagne et en Europe du Nord. Un premier test a été réalisé début 2015 avec une machine italienne de marque Mecmar, importée par les Ets Hervé Silos de Chantonnay.

« Les résultats se sont montrés très positifs, affirme l'éleveur. Nous avons testé plusieurs rations et comparé l'usage de graines crues et toastées. Chez nous, comme chez d'autres éleveurs du groupe, le gain varie entre 2 et 3 litres de lait par vache et par jour. » À la suite de ces bons résultats, un collectif d'éleveurs a souhaité investir dans le matériel. L'achat a été pris en charge par la Cuma départementale (voir encadré) qui met le matériel à la disposition des exploitations.

Le matériel, monté sur une remorque à double essieu, peut se déplacer de ferme en ferme. Cet ensemble mesure près de 10 mètres de longueur car, en plus du toasteur, le vendeur a installé une vis d'alimentation escamotable, un système de refroidissement du grain et une vis de vidange. L'utilisateur n'a que l'électricité à fournir, sa remorque de grains pour alimenter le toasteur et une autre remorque vide pour récupérer le produit.

« IL FAUT UN PEU DE PLACE POUR TRAVAILLER À L'AISE »

Dans la pratique, la Cuma a répertorié quelques sites chez des adhérents où la machine est utilisée plusieurs jours de suite pour le compte de différentes exploitations.

Le Gaec Ursule a déjà organisé plusieurs fois le chantier. « Il faut un peu de place pour travailler à l'aise et un branchement électrique en 380 volts, avec une prise Hypra et un compteur de 36 kW », ajoute Sébastien. Le tracteur, avec

la remorque pleine, se positionne à une extrémité et vide le grain dans un bac de réception. La vis alimente en continu le tapis du toasteur. Un brûleur à fuel produit un flux continu d'air chaud à près de 300°C. Cet air chaud traverse le tapis de graines qui avance en permanence. L'objectif est de chauffer le produit à 120°C environ. Ensuite, les graines passent dans une cellule de ventilation afin d'abaisser la température, avant de les renvoyer dans une seconde remorque. Le refroidissement évite qu'une condensation se forme dans le tas pour le stockage. L'ensemble est automatisé et ne nécessite qu'un seul opérateur pour veiller au bon fonctionnement. « Il faut travailler avec des graines propres, souligne Sébastien. Sans quoi, il existe un risque d'autocombustion ou de colmatage dû aux petits résidus qui carbonisent dans le circuit et peuvent se coller aux grilles. L'appareil consomme environ 20 l de fuel/h pour un rendement de 1,5 t/h avec des graines de gros diamètre, comme de la féverole, et de 2,5 t/h pour des graines de plus petit calibre. Selon la taille, il faut modifier l'épaisseur déposée sur le tapis ainsi que la vitesse d'avancement pour faire varier le temps de chauffe. »

« DES PDI MULTIPLIÉES PAR DEUX OU TROIS »

Au final, la prestation revient à près de 60 €/t que la Cuma facture à l'adhérent. Le traitement par la chaleur n'altère pas la graine puisqu'elle reste entière. Après toastage, le produit se conserve donc encore plusieurs mois sans précautions particulières. Le Grapéa a réalisé des analyses auprès d'un laboratoire pour comparer l'effet du toastage sur les graines de différents protéagineux (voir tableau). Les résultats montrent que si les valeurs en énergie sont peu modifiées, celles des PDI sont parfois multipliées par deux ou trois selon l'espèce employée. Ces résultats devront être affinés dans le temps. Jusqu'à présent, les références scientifiques en matière de valeurs nutritionnelles de graines toastées ne concernaient que le soja. Mais l'Inra du Rheu (Ille-et-Vilaine) doit prochainement entamer un programme d'expérimentation sur plusieurs années, en partenariat avec le Grapéa. L'objectif est de déterminer des tables de valeurs alimentaires pour les autres protéagineux plus couramment cultivés en France. « Pour le moment, nos résultats sont très positifs, conclut Sébastien. Deux stratégies s'offrent à nous : soit augmenter la production de lait en conservant la même quantité de protéagineux dans la ration, soit rester au même niveau de production en consommant moins de graines et en vendant notre surplus. »

DENIS LEHÉ

Les graines sont déposées sur un tapis à avancement continu. Elles sont traversées par un flux d'air chaud à 320°C.

© D.L.

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